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Les enseignants d'informatique enseignent l'informatique

La direction d'une école supérieure de commerce décide de mettre en place un LMS (Learning Management System ou système de gestion de l'apprentissage) et d'adapter plusieurs cours à cet environnement d'apprentissage et de pédagogie. La direction de l'école confie ce projet à la professeure d'informatique S. Celle-ci doit évaluer différents produits, recommander une solution technique, élaborer des scénarios pédagogiques et en présenter les avantages et les inconvénients. En tant que professeure d'informatique, elle semble prédestinée pour cette mission.

Un nouveau logiciel de simulation a en outre été acquis pour les cours de formation à la gestion d'entreprise, lequel doit être utilisé via l'Internet conjointement avec des étudiants d'autres écoles supérieures. L'utilisation pédagogique-didactique d'une simulation collaborative est une approche totalement nouvelle pour de nombreux professeurs. Que se passerait-il si S. n'était pas en mesure d'assurer un cours ?


Problème : les moyens informatiques sont présents à tous les niveaux de la formation, des logiciels standard jusqu'aux outils spécialisés en passant par les logiciels d'apprentissage et le e-Learning (formation en ligne). Les enseignantes et enseignants d'informatique sont souvent consultés à ce propos en tant qu'experts des questions pédagogiques et didactiques. Mais de nombreux enseignants se sentent dépassés par ces questions, tant au plan professionnel qu'au niveau de leur emploi du temps.

L'utilisation de l'ordinateur en tant qu'outil et support d'apprentissage donne lieu à des questions d'ordre pédagogique et didactique : sur quels principes doit se baser une bonne présentation ? Comment utiliser judicieusement les cyberquêtes ou les podcasts dans l'enseignement de l'histoire ? Quels sont les avantages des systèmes de calcul formel pour l'enseignement des mathématiques ? Faut-il mettre en place un LMS (système de gestion de l'apprentissage) au niveau de l'ensemble de l'école ? Un peu partout, un avis compétent sur ces questions est attendu de la part des professeurs d'informatique, mais cette attente est infondée. Un professeur d'informatique n'est pas en soi un expert dans l'utilisation appropriée des outils et des supports de TIC dans l'enseignement, tout comme le professeur d'économie n'est pas prédestiné à choisir les logiciels pour la gestion de l'établissement.

Si les professeurs d'informatique sont sollicités en tant que conseillers pédagogiques et didactiques pour l'utilisation des outils de TIC, des logiciels d'enseignement ou de l'e-Learning, ils sont alors détournés de leur véritable vocation, à savoir l'enseignement de l'informatique. De plus, l'emploi des professeurs d'informatique en tant que conseillers didactiques et pédagogiques n'est généralement justifié ni sur le plan économique, ni sur le plan des compétences. L'évaluation de l'usage approprié d'un outil TIC dans une spécialité impose d'être familiarisé avec les objectifs, les méthodes et le contenu de ladite spécialité. Il appartient ainsi au professeur de chimie, et non au professeur d'informatique, de juger de l'avantage à utiliser un logiciel donné pour la modélisation moléculaire.

La mise en application d'une stratégie d'e-Learning complète n'est pas non plus en premier ressort de la compétence de l'informatique. Il existe en effet un risque élevé que la stratégie mise en œuvre soit centrée sur la technologie si, dans un établissement de formation, les tâches et les décisions dans le domaine de l'e-Learning sont exclusivement confiées aux personnes issues du monde de l'informatique. Ce ne sera alors pas l'apprentissage qui se retrouvera au premier plan, mais l'utilisation des outils TIC.

Solution : les enseignants d'informatique n'ont pas vocation à traiter des questions pédagogiques et didactiques des outils TIC dans l'enseignement, ni à choisir les logiciels d'apprentissage et encore moins à élaborer ou mettre en œuvre une stratégie d'e-Learning. Les enseignants d'informatique doivent se limiter à leur domaine de compétence et ne doivent pas assumer seuls la responsabilité de ces questions.